19ème Congrès à Ottawa-Gatineau

27 Juin - 3 Juillet 2005

Résumés des communications
Samedi 2 juillet 2005

 

Samedi 2 juillet   10h45 – 12h15

Session I.   Le roman d’aventure francophone

Président : François-Xavier EYGUN, Mount Saint Vincent University

Secrétaire : Jean LEVASSEUR, Université Bishop’s

« Exotisme et historicité : Un revenant (1884) de Rémi Tremblay », Jean LEVASSEUR, Université Bishop’s

En 1884, un jeune Canadien français, Rémi Tremblay, faisait œuvre de pionnier avec la publication d’un roman que l’on qualifierait aujourd’hui d’autofiction, Un revenant, dans lequel sa participation (réelle) à la guerre de Sécession jouait un rôle prédominant, sans toutefois être exclusive. Dans la plus pure tradition des récits d’aventures, si populaires à l’époque, Tremblay y employait avec ferveur la veine déjà historique du conflit américain, permettant au lecteur de vivre des moments que l’Histoire n’avait pas encore eu le temps d’assimiler. Cependant, et sans doute inconscient de ce mode de faire, l’auteur y exploitait également, avec une adresse exceptionnelle, un autre type d’exotisme, l’exotisme social, représenté dans cet ouvrage par une incursion dans les milieux politiques corrompus du Québec contemporain, notion que la critique du XIXe avait reconnue, mais évitée, par crainte de représailles, et que celle du XXe siècle, inconsciente des réalités qu’il représentait, a complètement évacuée. La présence communication se penchera donc sur la nature et les formes d’exploitation de cet exotisme encore méconnu aujourd’hui, en conjonction avec l’incontournable exotisme historique.

« Les romans d’aventures de Pamphile Le May », Rémi FERLAND, Université Laval

Pamphile Le May (1837-1918) est principalement connu comme conteur et poète, mais a également publié, de 1877 à 1900, quatre romans (Le pèlerin de Sainte-Anne, Picounoc le Maudit, L'affaire Sougraine, Bataille d'âmes), qui appartiennent au genre du roman d’aventures. Cette communication présentera ces romans en montrant leurs caractéristiques communes et leurs différences. Seront examinés en particulier leur genèse (les influences possibles, les œuvres préliminaires, les liens avec le reste de l’œuvre de Le May), leur structure (en dyptique, pour trois d’entre eux), les procédés narratifs (la reconnaissance, l’anticipation, le récit parallèle), l’espace (Québec, Lotbinière et Montréal, mais aussi la Californie et le Grand Nord, c’est-à-dire l’ailleurs), les personnages (les bons et les méchants ; les héros et les victimes ; les personnages secondaires), le rapport entre la fiction et la réalité (la véridicité et l’historicité), la textologie (les variantes, les rééditions), l’accueil de la critique (la censure et l’éloge). Enfin, ce parcours des paramètres de l’œuvre romanesque de Pamphile Le May permettra de comparer celle-ci avec quelques productions analogues de la même époque.

« La pointe aux rats de George Forrestier (1907) : exemple de roman d’aventure ? », François-Xavier EYGUN, Université Mount Saint Vincent

La Pointe aux rats de George Forrestier publié en France en 1907, est le récit d’une entreprise de colonisation de l’Ouest canadien ; ce fut d’ailleurs le premier roman en français publié sur le Manitoba. Nous essaierons de relever les éléments, à travers ce roman en particulier, qui définissent le roman d’aventure à la fin du XIX siècle, et comment cela fonctionne dans le cadre du roman et dans un contexte historique. Les textes sur le roman d’aventure de Jacques Rivière et de Jean-Yves Tadié – entre autres – nous serviront d’outils critiques.

« L’aventure de la solitude : l’horreur célibataire dans Le secret de Wilhelm Storitz de Jules Verne », Peter SCHULMAN, Old Dominion University

« La mort ne détruit pas », nous apprend Sandorf dans Mathias Sandorf, « elle ne rend qu’invisible ». Or dans Le secret de Wilhelm Storitz, ce n’est pas la mort qui rend invisible, mais plutôt l’amour non réciproque de Storitz pour la belle Myra. Contrairement à d’autres célibataires, comme Phileas Fogg ou Michel Ardan, qui parcourent le monde (ou l’espace) joyeusement, ou Robur, qui songe à de grandes inventions, Storitz est enveloppé d’une haine qui le limite spatialement et émotionnellement malgré sa grande liberté de mouvement et le pousse vers une solitude effrayante qui fait écho au pessimisme que l’on retrouve souvent dans les derniers romans de Jules Verne. Comment l’espace de ce célibataire foncièrement antipathique se construit-il ? Comment Verne perçoit-il les notions du visible et de l’invisible au début du vingtième siècle ? A quoi pensait-il à l’aube de ce vingtième siècle qui se levait juste au moment même où sa propre vie commençait à s’éteindre ? De la chambre de Storitz, jusqu’à la ville de Ragz, nous examinerons l’importance de l’espace à la fois « célibataire » et « fantastique » de ce roman. Effectivement, Le secret représente une vraie rupture en ce qui concerne le reste du corpus vernien et demeure son livre le plus fantastique. Toujours est-il, qu’au niveau de l’espace, le roman offre aussi un champ sémiotique très riche et unique par rapport aux normes des Voyages extraordinaires, par exemple. Ainsi en se focalisant sur la question précise de l’espace célibataire, cette communication tentera de tracer les éléments particulièrement « uniques » tout en soulignant sa beauté tout à fait frappante et mystérieuse.

Session II.    Le cinéma francophone au carrefour des cultures et des écritures

Présidente : Dominique RYON, Université de Louisiane à Lafayette

Secrétaire : Thomas C. DADDESIO, Slippery Rock University

« Intertextualité et cinéma ‘impossible’ : le texte/film durassien », Sarah GASPARI, Université de Venise à Foscari

Cette communication propose une lecture des écritures entrelacées, contaminées et visionnaires de quelques œuvres de Marguerite Duras qui sont à mi-chemin entre narration et scénario filmique. En particulier, je « viserais » une nébuleuse de textes hétérogènes pris dans leur complexe rapport à l’image : un texte littéralement fondé sur un manque d’image qui est, à son tour, catalyseur d’écriture, L’amant (1984) ; un texte visible-non visible, L’homme assis dans le couloir (1980) ; une adaptation inédite et, surtout, irréalisée/irréalisable, L’amant, adaptation cinématographique de M. Duras (1987) ; un roman-scénario, L’amant de la Chine du Nord (1991). Cette intertextualité, constitutive dès le début des récits de Duras, va se compliquer ultérieurement quand l’auteur va s’occuper de théâtre et de cinéma, redoublant ces effets d’échos hybrides entre écriture coulant sur le papier et images visibles sur l’écran, voix de personnages romanesques et voix d’acteurs en chair et en os, fragments de narration jetés sur la page et fixation ou monstration (Gaudreault) de ces mêmes voix et personnages à l’écran. Deux résultats filmiques sont, à ce propos, très significatifs : un film encore « possible » à voir par des moyens visuels courants, India Song (1975) ; et un film « impossible » à voir par ces mêmes moyens, car il est déjà partiellement « transfiguré » par l’intertextualité, Son nom de Venise dans Calcutta désert (1976). Enfin, le chiffre poétique de Duras agit de plus en plus de façon qu’on se trouve systématiquement confronté à un pari inacceptable. L’œuvre filmique durassienne ne ferait finalement que postuler un objet paradoxal : l’existence d’un cinéma et, plus en général, d’un texte-film, à la fois engendré et détruit par l’intertextualité, un texte-film impossible et surtout introuvable (R. Bellour).

« Exils de Tony Gatlif ou l’impossible retour au pays natal », Thomas C. DADDESIO, Slippery Rock University

Tiraillé entre trois cultures (algérienne, française et rom), Tony Gatlif revient constamment à la problématique de l’identité. Dans son dernier film Exils, Gatlif suit à rebours la route de son propre exil en racontant le voyage des deux jeunes français au pays de leurs parents. Dans ce retour au pays natal déplacé, la question de l’identité se pose en termes de la connaissance de l’autre qui entraîne une connaissance de soi.

« Le cinéma francophone : réalités et fictions d’une nouveau champ disciplinaire », Dominique RYON, University of Louisiana at Lafayette